jeudi 28 mai 2009

mon cher roger

Essaouira le 20 mai 2009 Mon cher Roger, Tout ça est de ta faute. Je veux dire que si j’ai passé ma vie au théâtre, c’est à cause de toi. J’étais un jeune adolescent fou de théâtre, Un théâtre que je faisais en amateur , à cause de mon père Et avec tellement de joie. A la campagne , car comme toi, j’ai passé mon enfance à la campagne Je ne gardais pas les chèvres comme toi il est vrai, Mais j’ai gardé des traces. Et puis je suis venu faire mes études à Lyon, J’ai découvert le Théâtre de la Cité auquel je me suis abonné. J’ai vu Jacques Rosner et toi venir parler de vos spectacles au restaurant universitaire. J’ai voulu vous approcher un peu plus, et je suis devenu Responsable de collectivité. Et je me souviens que quand j’allais dans l’ancien théâtre de la cité. Je me disais je donnerai n’importe quoi pour balayer la scène. Et puis un jour de désespoir , je suis allé à la grande poste de Bellecour et d’une cabine téléphonique j’ai téléphoné au théâtre parce que j’avais su que vous cherchiez des figurants pour un spectacle. C’était pour “ patte blanche” et Yves Kerboul m’a dit que j’étais trop âgé Pour les rôles que vous cherchiez mais que je devrais monter le voir. Et c’est comme cela que je suis rentré, mon cher Roger dans ton théâtre en 1963 Pour être serviteur de scène dans Schweick. C’était mon premier emploi dans un théâtre professionnel. Je suis resté avec toi jusqu’en 1993 je crois . Chéreau était passé par là et m’a sauvé le jour ou vous avez voulu me licencier Il a décidé (tu venais de le nommer directeur) de me garder au contraire Pour faire le son de” Massacre a Paris” (où justement il n’y avait pas de son) Ce massacre à Paris qui a ouvert ton nouveau théâtre sous le sigle TNP Dont tu n’étais pas peu fier, et moi avec toi. Ton théâtre était tout neuf et comme je t’ennervais passablement par mon insouciance tu avais decidé (et c’est vrai) que je serai responsable de toutes les erreurs. Finalement j’ai adoré cette fonction de bouc émissaire dont les erreurs auront permis à ce théâtre De faire tant de brillants spectacles pendant plus de 30 ans. Comme j’habitais Villeurbannne et que nous étions presque voisin, J’adorais rentrer le soir avec toi a la fin des répétitions parce que nous avions 5 minutes privilégiées où nous étions seulement tous les deux. C’est. un de ces soirs ou tu m’as dit comme un secret que le théâtre de la Cité allait devenir TNP je me souviens de ton exaltation ce soir là. Et puis notre rupture me fait encore aujourd’hui beaucoup rire. Alors que je te demandais de me confirmer sit u avais besoin de moi pour faire le son de tes spectacles dans une saison à venir , tu m’a regardé dans les yeux Tu as froncé le sourcils comme tu le faisais si souvent quand tu réfléchissais Ou quand tu allais dire quelque chose de fondamental et l’index pointé vers moi Tu m’as dit : André considère que jusqu’à ma mort tu travailleras avec moi. Et à partir de ce jour là je n’ai plus jamais fait le son de tes spectacles. Et, mon cher Roger je ne t’en ai jamais voulu, parce que cette rupture ne m’empêchait pas d’avoir une admiration sans borne pour toi. Certes tu m’as méprisé souvent quand j’étais plus jeune mais je ne le voyais pas parce que je t’aimais trop et j’aimais trop le théâtre que tu me permettais de faire à tes côtés. Certes j’ai du souvent t’en vouloir mais c’étaient des moments, Et puis grcâe à Jacques Rosner nous nous sommes retrouvés il y a quelques temps quand tu as joué le rôle de Gorki, tu n’étais plus mon patron, tu étais un acteur et moi inlassablement je continuais à faire aboyer les chiens et crisser les grillons. Et là nous avons eu des discussions amicales et tellement essentielles . Moi qui ne t’aimais pas toujours comme acteur je trouvais que dans ce spectacle là, tu étais d’une justesse extraordinaire et je t’en ai fait part, et nous avons parlé du rôle , du travail de l’acteur , du travail sur un texte, et de tant de choses diverses, je te disais que j’habitais en partie au Maroc mais que je ne me faisais pas à la vie contemplative et tu m’as dit qu’il fallait apprendre cela et nous avons ri ,et bavardé et à nouveau nous sommes allés prendre le métro ensemble comme autrefois. J’ai passé plus de trente années avec toi, Roger, tu m’as appris le théâtre, tu as fait ton temps comme on dit à l’armée et tu es parti en dormant. Chapeau. Je t’aime toujours. André

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